Dire que Starfield, le dernier né de Bethesda Game Studios était attendu est un doux euphémisme. Les fans des précédentes productions du studio frémissaient d'impatience dès son annonce. Les férus de jeux spatiaux n'en pouvaient plus d'attendre et parlaient déjà d'un "Star Citizen killer".
Sorti le 6 Septembre 2023, l'exclusivité de Microsoft (PC, Xbox Series) divise pourtant la communauté à l'heure où j'écris ces lignes.
Du coup, j'avais envie de m'y attarder. Entre attentes démesurées et review bombing, j'aimerais donner mon avis sur le jeu et tenter d'expliquer pourquoi le titre défraie autant la chronique.
Starfield, c'est avant tout une arlésienne. La promesse d'un renouveau pour Bethesda qui n'avait pas accouché d'une nouvelle licence depuis 25 ans. Un retour en force après l'immense tollé qu'a causé Fallout 76, et l'une des grosses cartouches que Xbox s'était offert en rachetant Zenimax.
Todd Howard, la tête pensante de Bethesda Game Studios a révélé le chiffre décadent de 1000 planètes visitables. Il a déclaré une grande immersion, des quêtes prenantes et un aspect "jeu de gestion" chronophage. Un petit programme déjà alléchant sur le papier. Voyons ce qu'il en est donc.
Petit aparté : cet avis est garanti sans spoil majeur. Je parlerai très rapidement du début du jeu, le reste est à découvrir.
Le personnage que vous incarnez (et que vous créerez via un éditeur très complet) commence l'aventure en tant que mineur dans une caverne. Là, vous entrez en contact avec un minerai étrange qui vous donne des hallucinations et vous vous réveillez quelques jours plus tard. À partir de là, une organisation d'explorateurs appelée Constellation s'intéressera à ce que vous venez de vivre et vous recrutera pour un voyage aux quatres coins de la galaxie.
Vous aurez donc des centaines de planètes à visiter. Certaines abritent des villes, chacune possédant son identité propre. New Atlantis est le fantasme de la ville futuriste utopique et Neon City a une ambiance cyberpunk très marquée. Akila ressemble quant à elle à une vieille ville du Far West. Les décors et les paysages lunaires vous décrocheront la mâchoire à coup sûr.
Sur le plan graphique, le jeu est sincèrement beau. Les textures ne sont pas les plus détaillées mais elles restent très correctes. La direction artistique est sublime je trouve, mais ce sont surtout les éclairages qui sont incroyables. La lumière diffuse du soleil dans le noir spatial est époustouflante. Les éclairages en intérieur sont de grande qualité, et visuellement le jeu marque quand même un bond en avant par rapport aux autres productions Bethesda.
Le travail sonore n'est pas en reste : les musiques orchestrales sont excellentes et collent bien à cette immensité spatiale qu'on ressent. Les bruitages eux aussi sont de grande qualité. Le son des armes fonctionne bien, les planètes ont chacune leur propre ambiance sonore et le grondement saturé des moteurs lorsque notre vaisseau décolle est un plaisir auditif.
Certaines quêtes sont tout bonnement exceptionnelles. L'histoire principale vous fera visiter différents mondes à la recherche d'artefacts mystérieux. Même si elle reste intéressante, elle ne sert cependant que de prétexte pour vous faire voir du pays (ou du cosmos dans le cas présent).
Les quêtes secondaires sont l'une des plus grandes réussites des jeux Bethesda, et Starfield ne déroge pas à la règle. Celles-ci sont très diversifiées, et les missions de factions sont très prenantes. Le jeu regorge de tellement de quêtes qu'il est facile de dévier de son objectif initial en visitant New Atlantis par exemple. On vous demandera souvent de voyager entre les planètes, ce qui est un bon point pour découvrir le contenu d'un jeu aussi immense.
Je ne me suis pas trop attardé sur la fabrication de remèdes ou d'armes lors de ma partie, mais la modification de vaisseaux est très addictive. Vous pouvez assembler plusieurs pièces, déterminer où placer vos moteurs, vos missiles ou encore la couleur de chaque pièce de votre appareil. Les possibilités sont folles, et il suffit de voir les créations des internautes pour se visualiser le potentiel de l'outil.
Il en va de même pour la construction d'avant-postes, qui constitue un jeu de gestion à part entière dans lequel on engloutit des trentaines d'heures. Ceux-ci serviront à extraire des ressources afin de les revendre ou des les utiliser comme matériaux de fabrication. Mais vous pouvez en faire tout autre chose. Vous pouvez créer de grandes forteresses lunaires, ou des habitations dans des environnements déserts. Sentiment de dépaysement et de solitude garanti.
Le jeu est extrêmement généreux. Todd Howard avait promis 1000 planètes dans Starfield : promesse tenue. Il l'a aussi décrit comme un Skyrim dans l'espace. Et c'est tout à fait vrai. C'est un peu trop vrai d'ailleurs.
Passé "l'effet waouh" des premières heures, on se rend vite compte que les mondes qu'on découvre se ressemblent beaucoup. De grandes étendues rocheuses dépouillées, quelques grottes ici et là, des usines, des camps et c'est tout. Multipliez ça par 1000, et vous avez un aperçu de la répétitivité des environnements et de ce qu'on y fait. J'aurais largement préféré 8 planètes maîtrisées que des centaines d'astres éparpillés et vides pour la plupart.
D'autant que la navigation en vaisseau est elle aussi décevante, voire quasi inexistante. Les seuls moments où vous pourrez piloter librement sont lorsque vous êtes en orbite autour d'une planète. Sinon, votre appareil ne servira que de passerelle de voyages rapides entre les planètes, ce qui complexifie inutilement les trajets.
On sent réellement le potentiel de Starfield en y jouant. Mais on sent aussi que le jeu est bridé par cette structure à l'ancienne et les outils de développement poussiéreux utilisés.
Voir encore en 2023 des dialogues statiques sur un blockbuster de cette envergure, ça fait bizarre. De même pour l'intelligence artificielle toujours aux fraises 12 ans après Skyrim. Voir des PNJ bugger derrière une porte fermée, c'est risible.
Devoir passer par quatre temps de chargement et trois menus pour se rendre dans une autre ville, c'est aberrant je trouve. Même entrer dans certains bâtiments requiert des temps de chargement. Proposer un vaisseau pour qu'il ne serve au final que de point de voyage rapide, car intégrer de vrais voyages spatiaux est trop complexe ? C'est extrêmement frustrant. L'exploration et l'immersion en prennent un coup.
Je n'affirme pas que la structure et les mécaniques à l'ancienne de Bethesda sont à jeter. Mais reprendre la recette d'un Skyrim avec les mêmes outils et les appliquer à un univers aussi démesuré que celui de Starfield, ça ne marche pas.
Peu après la sortie de Starfield, on voit apparaître des critiques peu élogieuses, voire carrément assassines. D'un autre côté, des joueurs lui donnent la note maximale. Il prend un 6 sur 10 sur Metacritic, ce qui équivaut à un jeu moyen. Entre ces deux camps, que penser ? Le jeu est si décevant que ça ?
Le review bombing (donner des notes extrêmes sur des sites reconnus pour faire entendre son mécontentement) est de plus en plus courant ces dernières années. The Last of Us Part 2 en a fait les frais, de même pour Horizon Forbidden West.
Cette pratique montre deux choses. D'abord, une tendance grandissante à souvent basculer dans les extrêmes dans les débats. Soit le jeu est bon, soit il ne l'est pas. "Un juste milieu ? Connaît pas". Ensuite, elle montre à quel point le système de notation ne convient pas aux jeux vidéo. On ne note pas un jeu comme un examen de philo, c'est évident.
Mais du coup, est-ce que Starfield mérite tout ce bashing à base de review bombing ? Absolument pas. Le travail derrière reste monstrueux, et le jeu possède de vraies bonnes qualités. Il faut néanmoins persévérer suffisamment pour que la mayonnaise prenne. Et tout le monde n'a pas la patience ni le temps pour ça.
Je le répète : j'aime beaucoup Starfield. La qualité des quêtes (marque de fabrique du studio) est toujours au rendez-vous. Passé ses défauts, on s'amuse quand même beaucoup. On crée ses bases, on engloutit des dizaines d'heures dans la collecte de ressources, on prend part à des histoires intéressantes. Si c'est ce que vous attendiez, foncez ! Vous prendrez un pied monstre.
Mais ne vous attendez pas à autre chose que ce que Bethesda a l'habitude de faire. C'est du Fallout, c'est du Skyrim, en moins maîtrisé (car plus éparpillé). Et je pense que ceux qui ont descendu le jeu s'attendaient à autre chose. Peut-être à un No Man's Sky façon Bethesda. Si c'est ce que vous voulez, la déception sera grande.
Pour conclure, Starfield reste un très bon jeu à mon sens. Cependant, ses ambitions souffrent d'un Bethesda resté trop ancré dans ses outils et mécaniques d'antan. Un comble pour un jeu qui se passe dans le futur.
A propos de l'auteur Franzzy54
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