La première fois que j'ai entendu parler de Shadow of The Colossus (enfin je crois), c'était en 2007 dans À cœur ouvert. Dans ce film moyen, mais touchant, Adam Sandler interprète un homme coupé du monde parce qu'il a perdu sa famille. Dans sa bulle, il passe une grande partie de ses nuits à jouer à Shadow of The Colossus. C'est pour lui un moyen de s'évader du monde réel et de se reconnecter avec lui-même dans un monde parallèle onirique. À l'époque, il ne m'en avait pas fallu plus pour acheter le jeu et constater que l'acteur avait parfaitement résumé l'expérience qu'il procure.
Principe récurrent de tous les jeux de la Team Ico, vous êtes catapulté dans une aventure dont vous ne connaissez ni les tenants, ni les aboutissants. Tout ce que vous savez, c'est ce qui se déroule devant vos yeux, rien de plus.
Vous êtes donc un jeune cavalier armé d'une épée et d'un arc et vous entrez dans un temple abandonné avec un paquet à taille humaine déposé sur votre cheval. Arrivé devant un autel, vous y déposez le paquet et vous dévoilez le corps sans vie d'une jeune femme.
Peu après, une voix se fait entendre et vous enjoint à détruire les idoles de pierre du temple pour redonner vie à votre bien-aimée. Mais, pour cela, il va falloir vaincre 16 colosses dont les statues sont les exactes représentations.
Vous le constatez, le synopsis du jeu peut tenir sur un timbre-poste et laisse libre court à votre imagination. Mais après quelques colosses vaincus, vous en saurez un peu plus, ce qui devrait changer la vision que vous avez de votre aventure.
Si j'ai autant insisté sur le scénario du jeu, c'est parce que son gameplay y est intimement lié. La moitié du temps, vous galopez sur votre cheval dans des plaines abandonnées en vous repérant à l'aide de l'éclat du soleil sur votre épée. Cet éclat vous donne la direction à suivre pour trouver le prochain colosse à vaincre.
Une fois en mode combat face au colosse, vous devez trouver son point faible, puis vous accrocher à sa peau et à sa fourrure afin d'atteindre un point vital et de le transpercer avec votre épée.
La difficulté de cette action réside dans le fait que vous devez toujours doser votre stamina lorsque vous vous agrippez à un colosse au risque de tomber et de devoir recommencer le combat depuis le début. C'est l'aspect le plus frustrant du jeu, mais c'est également celui qui lui donne sa dimension épique.
Jeu d'exploration monde ouvert, jeu d'énigme et de puzzle, jeu d'aventure... Shadow of The Colossus emprunte à tous les genres pour n'en garder que la substantifique moelle et proposer un gampelay aussi épuré et minimaliste que possible.
Vous vous retrouvez dans un territoire immense et mystérieux, vide, à part quelques lézards et volatiles. Il n'y a que vous, votre cheval, le silence, les montagnes et les ruines qui vous entourent. Un choix d'environnement qui fait la part belle à l'onirisme et qui invite le joueur à parcourir un peu plus en profondeur ces terres désolées et arides pour en découvrir tous les secrets.
Shadow of the Colossus sur PS2 a vieilli, mais à l'époque, il représentait ce qui se faisait de mieux sur le support. L'impression de vitesse lorsque l'on galope à cheval, le visuel des colosses, les environnements... la qualité technique du jeu est saisissante. Si bien que la console peut parfois avoir des difficultés à supporter l'ensemble des éléments présents à l'écran. Une beauté visuelle qui participe beaucoup à l'immersion dans cet univers lyrique et tragique.
La première chose que vous allez devoir apprendre à faire dans le jeu, c'est chevaucher votre compagnon Agro, car vous allez sans cesse devoir faire appel à lui lors de vos déplacements sur la carte. Cette relation/coopération avec votre monture est essentielle pour la partie exploration de votre aventure. Et, avec le temps, vous allez même vous surprendre à avoir de l'affection pour cet animal qui accompagne votre solitude.
Pour la partie action, la qualité est aussi au rendez-vous. Tout d'abord, chaque apparition de colosse représente un événement et donne l'impression de se retrouver face à un adversaire mythologique dont on ne viendra jamais à bout.
Le gameplay basé essentiellement sur le fait de gérer sa stamina en s'accrochant à la fourrure du géant renforce cet aspect épique (sans parler de la musique). Vous êtes ballotté dans les airs, sous l'eau, attendant patiemment votre chance, jusqu'à ce que vous parveniez à terrasser la bête.
À ce moment, le sentiment d'accomplissement est total, mais également mêlé à un peu de mélancolie. Une cinématique présente le colosse qui s'écroule, le tout, accompagné d'une musique déchirante. Comme si le jeu voulait nous faire réfléchir sur les conséquences de nos actes... et ça marche très bien.
Mais Shadow of The Colossus n'a pas reçu que des louanges. Encore aujourd'hui, de nombreux gamers détestent le jeu et sont totalement passés à côté de ses qualités et critiquent (parfois injustement) plusieurs des choix artistiques de Fumito Ueda.
La critique qui revient tout le temps, c'est celle concernant le frame rate qui fait des siennes et les bugs de collisions. Bon là, rien à redire, les plaintes sont recevables.
Autre critique, cette fois-ci un peu moins légitime : le cheval est difficile à diriger. Ce que les détracteurs du jeu n'ont pas compris, c'est que dans SOTC, vous ne contrôlez pas le cheval directement, vous contrôlez Wander qui contrôle Agro. Une différence de taille qui ajoute à l'immersion du jeu.
Enfin, dernière critique, le jeu est souvent jugé trop répétitif. Un blâme que l'on peut entendre, mais c'est un choix conscient de l'équipe de développement et non pas une erreur de leur part. C'est comme si on reprochait au Seigneur des Anneaux de trop s'étirer en longueur.
Grâce à son succès, le jeu a connu deux portages, l'un sur PS3 (dans une édition spéciale avec Ico) et un autre sur PS4. Sur PS3, les modifications sont principalement visuelles. Les graphismes ont été remastérisés en haute définition et le rendu est plus que réussi.
Mais le jeu prend vraiment un autre aspect avec le remake sur PS4. Les graphismes y ont été encore améliorés et offrent un rendu 4K qui donne une toute autre dimension au jeu. Le décor fourmille maintenant de détails et les colosses présentent un aspect plus réaliste.
Pour finir, la bande son originale a été retravaillée par son compositeur Kow Otani et la jouabilité simplifiée, sans pour autant qu'elle perde de son exigence. En somme, c'est quasiment un nouveau jeu que l'on a face à nous.
A propos de l'auteur Scylla
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